Raymond Coppinger est un biologiste et c'est principalement dans cette perspective qu'il souhaite nous
parler du chien. Le début de l'ouvrage traite des origines du chien (loup, coyote, chacal)et du concept
de commensalisme. Selon lui, c'est le chien qui s'est approché des sociétés humaines et non l'humain qui
est allé chercher le loup pour le domestiquer. Le chien primitif se serait adapté à une niche écologique.
Le nombre de chiens dans le monde témoigne d'ailleurs du succès biologique du chien sur le loup. L'auteur
insiste sur le fait que le chien n'est pas une sous- espèce du loup, les comportements de celui-ci ne
s'appliquent donc pas forcément aux chiens.
Coppinger pose une question audacieuse : comment définir la relation humains-chiens ? S'agit-il de mutualisme
(relation bénéficiant aux deux espèces), de parasitisme (une espèce obtient des bénéfices au détriment de l'autre),
ou d'amensalisme (une espèce a un effet négatif sur l'autre sans le vouloir car il n'en retire aucun avantage).
La réponse n'est pas aussi tranchée ni facile qu'on le souhaiterait.
Coppinger a beaucoup étudié les chiens de village (chiens commensaux) dans différentes parties du monde.
Ces chiens sont semblables physiquement et vivent à proximité des humains sans vraiment avoir de relation
avec eux. Pour lui ce type de chien est ce qui est le plus proche du chien originel. Les races de chiens
apparues plus tard découlent du choix des humains de favoriser ou développer telle ou telle caractéristique
(taille, couleur, type de poil, etc.) Bien souvent, on créé artificiellement une race (en choisissant un trait
qui nous plaît) et on lui trouve, par la suite, une histoire (très ancienne de préférence) expliquant pourquoi
tel trait est important.
Coppinger ayant eu et utilisé de nombreux chiens de traineau et ayant par ailleurs étudié les chiens de troupeau
et de garde de troupeau, il nous parle aisément de la conformation du chien selon son utilisation. Il évoque non
seulement la conformation physique mais aussi la conformation comportementale. Selon les races, la séquence de
prédation ne sera pas la même, le chien ne pourra donc pas être utilisé pour certaines fonctions ou au contraire
être bien équipé pour effectuer un travail précis. L'oeil du border collie, la prise en gueule du retriever etc.,
vont constituer des éléments aussi importants qu'une conformation physique. Certains chiens ne feront donc pas
de bons chiens de compagnie.
Par ailleurs, il soulève un concept qui vaut qu'on s'y attarde : les humains n'ont pas vraiment besoin des chiens
pour leurs activités (chasse ou autre) mais il semblerait qu'on aime simplement regarder les chiens travailler.
Coppinger a la dent dure envers l'éducation et l'utilisation des chiens d'assistance, qu'il qualifie d'esclavage.
Pour lui ce sont des chiens qui n'obtiennent rien de leur relation avec l'humain car même les plus doués ne
pourront se reproduire puisqu'ils sont stérilisés. De plus, ils ne sont pas autorisés à avoir un comportement de
chien (courir,chasser, rencontrer des congénères...).
L'auteur dénonce, par ailleurs, le risque de consanguinité entretenu par les éleveurs qui recherchent la pureté
de la race et qui mène rapidement à des problèmes de santé. Il faudrait éviter d'avoir recours aux mêmes lignées.
Il va même plus loin en disant qu'au lieu de se poser la question "quel genre de chien devrais-je avoir", il
vaudrait mieux se dire "j'aimerais créer un chien pour ce genre de tâche". Il est bien entendu favorable à
l'apport de sang d'une autre race dans une race donnée. Surtout qu'il affirme que toutes les races sont plus ou
moins liées et que les humains ont juste favorisé tel ou tel trait physique pour créer une race. Toutes les races
modernes de chiens sont issues, à l'origine, de croisements.
Coppinger fait des exposés remarquables et soulève des concepts fascinants qui nous font voir les chiens et nos
relations avec eux sous un autre jour. Captivant, cet ouvrage est devenu une référence. En espérant une traduction
française très prochainement.
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